Un film que j'aime beaucoup... Et vous ?
Petit tailleur, un film de Louis Garrel
Après Mes copains (déjà sélectionné à la Quinzaine 2008), le jeune premier ténébreux du cinéma français passe une deuxième fois derrière la caméra. Alors, est-ce que bon sang ne saurait mentir ? Même si on commence à être un peu fatigué du népotisme en France et des dynasties du show-business, force est toutefois de constater que le fiston sait tenir une caméra. Malheureusement, son scénario n’est pas encore assez développé et lorgne un peu trop vers la Nouvelle Vague.
S’agissant d’un court métrage, à la durée inhabituelle de 44 minutes, on ne peut pas trop juger de la suite qu’il donnera à sa carrière s’il a envie de récidiver par un long métrage. Mais on le sent un peu trop tétanisé par toutes les figures tutélaires qui le regardent à commencer par son grand-père (apparition dans le film), son père à qui il emprunte la lumière, le noir et blanc et la petite voiture de sport du Vent de la nuit. Mais ce n’est pas tout, attention Louis au cinéma citationnel à défaut d’être situationniste : on y retrouve la course de Mauvais Sang de Leos Carax, l’ambiance nocturne des amours malheureuses de Boy meets Girl du même Carax, la déclinaison du corps de la femme chère à Godard dans son chef d’œuvre, Le Mépris, la voix-off qui rappelle parfois un peu la malice de Doisnel chez Truffaut, etc. Pour le reste, comme Louis Garrel, trop occupé qu’il est à tenir sa caméra, n’interprète aucun rôle, il a trouvé sans peine des clones entre Saint-Germain-des-Prés et Odéon, un milieu qu’il doit bien connaître, petit monde lunaire et hystérique du théâtre qui se faufile dans un drame romantique de Kleist.
Encore une histoire d’amour, me direz-vous, mais que raconter d’autre au cinéma ? En fait, cherchez l’intrus, il y a dans ce film un petit tailleur goy tiraillé entre son amour pour une fofolle théâtreuse et son professeur de couture, vieux juif qui a connu la Déportation et qui ne va pas tarder à lui léguer son atelier avant de mourir. Même si le sujet est traité avec désinvolture, celle-là même qui constitue le personnage de Louis Garrel à travers tous ses films, on sent affleurer une tendresse qui aurait pu être moins bridée.
JMM